Congrès 2006: L.A.Con IV
(Les billets suivants ont originalement été publiés sur fractale-framboise.com en août 2006)
Prologue: Un homme avec une mission
Voici un aperçu chronologique de ce que j’ai fait hier, le 22 août 2006. Rien de bien spectaculaire, rassurez-vous: seulement un voyage dans le temps et l’espace, pour voir le film le plus sensationnel de tous les temps.
4:00 - 40 kilomètres à l’est d’Ottawa - Je me réveille deux heures plus tôt que d’habitude avec une envie irrésistible: aller voir Snakes on a Plane, le film le plus important de notre époque. Mais un tel film ne peut être vu au cinéma près de chez-soi. Non: pour cette oeuvre emblématique de tout un type de démarche artistique, il faut trouver un endroit approprié. Le soleil se faisant toujours attendre, la réponse se définit peu à peu dans mon esprit: Il faut aller voir Snakes on a Plane au cinéma le plus connu de la planète, celui qui a présenté le plus d’avant premières Hollywoodiennes que n’importe que autre endroit: le Grauman’s Chinese Theater sur Hollywood Boulevard, à Los Angeles. J’ai une mission, et rien ne saura me distraire avant d’accomplir cet objectif.
4:40 - On sonne à ma porte: Il s’agit de ma soeur et de mon frère, passant tout à fait par hasard chez-moi pour voir s’ils pouvaient m’amener en quelque part. Sautons dans la voiture, leur dis-je, et amenez-moi à l’aéroport Trudeau! Ils s’exécutent de bonne grâce: nous parvenons à Montréal alors que le soleil se lève au dessus de l’autoroute 20.
6:45 – Montréal, QC – Le premier vol pour Los Angeles est sur Air Canada, ce grand symbole d’unité canadienne. (Riche ou pauvre, anglo ou franco, tout le monde aime se plaindre d’Air Canada.) Donnez moi un billet, dis-je et assurez-vous qu’il n’y a aucun serpent dans l’avion! Ils prennent mon argent avec efficacité et je bondit vers la station des douanes américaines…
8:10 – …pour subir presqu’une heure de file d’attente avant de passer devant un douanier, qui accueille avec impassivité mon plan grandiose d’aller renforcer l’hégémonie culturelle américaine. On me demand eensuite d’enlever mon manteau, mon sac à dos et mes chaussures, ce qui est d’autant plus raisonnable que des serpents auraient pu s’y introduire à mon insu. Via la télévision de l’aire d’attente pour le vol, nous entendons Les passagers des lignes aériennes demeurent nerveux après les récentes menaces de terrorisme, comme s’il s’agissait d’un réplique de fond des cinq premières minutes d’un film d’action.
9:10 – Au dessus de Montréal, QC – Les choses sérieuses commencent: Notre avion a décollé, et je suis aux aguets pour de quelconques sifflements perfides.
Entre 10:30 et 13:30 – Quelque part au-dessus des États-Unis – Voyage dans le temps! Il était 13:30, il est maintenant 10:30. Je me sens tout drôle, mais c’est peut-être à cause de la nourriture. Ou bien parce que l’on nous montre le premier court-métrage de Wallace et Gromit. Toujours aucun signe de serpents.
12:00 – Los Angeles, Californie - Nous atterrissons à Los Angeles sans l’ombre d’un problème ni d’un reptile. Je touche au but! Au diable les taxis: je saute dans la première navette qui se montre à nous…
13:30 – Anaheim, Californie - …pour me retrouver à Disneyland? Quoi? Mais non, ce n’est pas Rats in a Park que je suis venu voir! Je me prends une chambre d’hôtel à l’hôtel le plus rapproché, puis je me précipite à l’arrêt d’autobus pour prendre le 460, direction centre-ville de Los Angeles.
16:00 – Centre-ville, Los Angeles, Californie – Décidément, les transport en commun en mettent du temps pour franchir 40 kilomètres. Et il est reste encore dix à franchir avant de parvenir au Graumann’s Chinese Theater. Tant pis: Je m’enfonce profondément sous terre pour me retrouver dans le système de métro de Los Angeles. La ligne rouge va à North Hollywood: ça me semble tout à fait approprié.
16:30 – Boulevard Hollywood, Los Angeles, Californie – Ha! Voici le cinéma, et il ne me reste que dix minutes avant la prochaine représentation. Mais où est le box-office?
16:40 – J’achète mon billet et on me souhaite la bienvenue au célèbre Graumann’s Chinese Theater.
16:50-18:00 – Nirvana – Que dire de plus sur ce nanar abouti qu’est Snakes on a Plane? Perfection, pure perfection.
21:30 – Anaheim, Californie – De retour à l’hôtel, un panneau m’interpelle: World Science Fiction Convention. Ça alors! Je me retrouve à Anaheim en même temps que la Worldcon! Quelle coïncidence! Tant qu’à être ici, pourquoi ne pas passer les quelques prochains jours à la convention?
Plus de détails au prochain épisode…
Première jounée
Quelques photos pour résumer la première journée de Worldcon 2006…
L.A.Con IV a lieu a quelques centaines de mètres au sud de Disneyland, à Anaheim en Californie (un ville à quarante kilomètres au sud-ouest du centre-ville de Los Angeles). Worldcon prends à peu près le tier du gigantesque Anaheim Convention Center, qui accueille (en même temps!) le “South California Home and Garden Show” dans ce qu’il reste de l’édifice.
L’enregistrement a lieu de façon rapide et ordonnée. Je ne suis pas particulièrement épris de la badge trop légère et virevoltante que l’on nous a fourni, mais à quoi bon se plaindre à ce moment-ci?
Ceci étant la première journée, il n’y a ni les grandes foules ni les super-vedettes que l’on peut espérer plus tard durant le congrès. Mais il y a les sous-fandoms habituels…
L’ouverture du congrès s’est fait à 13h30.
Les cérémonies d’ouverture n’ont pas été un moment fort de la journée (disons que les fans ne sont pas sélectionnés pour leurs prouesses oratoires).
En revanche, le tout s’est grandement amélioré dès que l’on nous a permi l’accès à la “concourse”, le mélange d’expositions, de kiosques et de bidules amusant composant l’aire commune de la convention.
Tout cela, bien sûr, est sans compter les multitudes de tables-rondes offertes. Au programme de ma journée: une table ronde sur la critique, une autre sur la “necessité” de conserver des choses telles la mascarade, les films, le filking à des conventions (une discussion qui a vite dévié sur l’aspect tout-inclusif de la Worldcon, et des buts d’un événement tel la Worldcon.)
J’ai particulièrement apprécié la table ronde sur les tendances actuelles en SF, pas autant pour la discussion que pour le fait qu’il s’agissait d’une excellente occasion de voir à l’oeuvre Lou Anders, une des nouvelles personalitées dominantes de la SF, ainsi que Gary K. Wolfe, critique emeritus à Locus.
Autre moment fort de la journée: Rencontrer David Marusek (auteur du bien bon roman Counting Heads) tout à fait accidentellement en tournant un coin. (Worldcon est un des seuls endroits où il est utile de se souvenir de la photo d’un auteur) Ce qui est d’autant plus incroyable, c’est que l’on ne l’a pas inscrit au programme en tant que participant (même pas de séance de signature, ou de kaffeklatsch), et ce malgré sa bonne volonté et des bonnes réactions à son premier roman. Cré programmation de Worldcon…
Et tout cela ne fait que commencer…
Deuxième journée
Au programme de cette deuxième journée: tables rondes, discours d’honneur et des photos pour vous faire plaisir.
Il y avait définitivement plus de monde aujourd’hui, alors que plus de congressistes arrivent sur les lieux et les vedettes commencent tranquillement à être mis au programme.
J’ai déjà mentionné la concourse, cette aire commune qui sert à abriter les expositions faniques, la salle de vente, l’aire de restauration et les excuses pour photos. Voici donc quelques unes de ces photos.
Et il y a les grands classiques:
En matière de tables rondes, il y en a pour tous les goûts. Vous ne serez pas surpris d’apprendre que j’ai tendance à m’intéresser à la programmation portant spécifiquement sur les sous-genres de la SF:
Mais il y a des exceptions, et je ne résiste pas mieux que les autres à l’attrait de la célébrité. Si Marina Sirtis (“Troi”, Star Trek TNG) était sur place, j’ai préféré aller assister à une présentation du “Political Animal” Kevin Drum.
La soirée était réservée à quelques présentations spéciales et les discours des invités d’honneur.
Deux jours de terminé: il en reste encore trois!
Troisième journée
En retard, mais bon –voici une courte description du vendredi 25 août 2006 à L.A.Con IV.
(Pourquoi le retard? Dans l’ordre : Manque de temps à L.A.Con, tourisme à Los Angeles, voyage transcontinental et rhume importé de Californie.)
Worldcon dure habituellement du jeudi au lundi, mais L.A.Con a décidé de faire exception en avançant tout d’un jour. La troisième journée du « samedi » est donc devenue un vendredi et le rythme de la convention a continué de s’accélérer. Assortiment continu de tables rondes, célébrités grandissantes et diversions faniques sont au goût du jour.
Mon premier panel de la journée a été relui des recommandations : Cinq critiques/éditeurs bien connus, tous bien fournis en services de presse, nous ont livré une liste assez complète de ce qu’ils recommandent pour les prochains six mois. Plutôt que de tenter de me casser la tête à déchiffrer ma liste de notes, laissez-moi vous diriger vers le billet de Mark R. Kelly à ce sujet. Je ne connais pas la moitié des titres mentionnés, mais je peux vous dire que l’autre moitié est effectivement très bien choisie.
Mais pourquoi faire confiance à des critiques impartiaux quand on peut simplement gober la pub des éditeurs eux-mêmes? C’est pour cette raison que je me suis présenté à la présentation des nouveaux livres de la maison Pyr, un éditeur maintenant appuyé par une solide brochette d’auteurs (Mike Resnick, Ian McDonald) et d’artistes (John Picacio, Dave Seeley) J’ai, à nouveau, été particulièrement impressionné par l’habileté de Lou Anders (l’éditeur en chef de la collection) à résumer l’essence de ses livres en quelques phrases frappantes. « Un livre Baen épuré à travers un club S&M! » (La trilogie Structure, Martin Sheckley)) « Doom plus le Wall Street Journal! » (Infoquake, David Louis Edelman), « Des jésuites qui se battent dans une église, du tir à l’arc quantique et du fétichisme de super-héros » (Brasyl, Ian McDonald). J’ai profité du temps libre après la présentation pour aller serrer la main à John Picacio (pour le design de son propre Cover Art) et Ian McDonald (pour River of Gods), et plus de faire la rencontre de Joel Sheperd, auteur de Crossover.
Une autre bonne table ronde de la journée : « Gouvernement Mondial » avec les formidables intellects réunis de John Barnes, John Shirley, Karl Schroeder, Tad Daley et Brenda Cooper. Barnes et Schoeder, travaillant chacun de leur côté, ont donné un aperçu intéressant d’un trans-nationalisme rendu envisageable par les besoins grandissants des villes hybrides telles San Diego/Tijuana, ou bien Vancouver/Seattle. Bien que pas nécessairement sur la SF, ce type de discussion futuriste souvent abordé à Worldcon est inspiré par la SF et, souvent, mène à des pointes d’inspiration pour les auteurs derrière la table ou dans l’audience.
Au cours de la journée, je n’ai pas pu résister à l’envie de faire un autre passage à la concourse…
Mais la concourse n’avait pas le monopole des choses à voir. En forçant des yeux, on pouvait voir des petits bonhommes verts flotter par-dessus nos têtes…
…sans compter les célébrités grandissantes. Typiquement aux conventions sud-californienne, L.A.Con IV a pu profiter d’un panel des « Killer Bs » (Benford, Brin et Bear), auquel s’est exceptionnellement ajouté Vernor Vinge. Tous quatre ont remplis une salle à discuter des « menaces que l’on ne voit pas venir. » Ce qui est d’autant plus fascinant, c’est que ces quatre écrivains agissent occasionnellement comment consultants pour le gouvernement et des corporations américaines : ils en savent un peu plus que le badaud ordinaire sur la question, au point de se taire sur certains sujets. Brin à lui seul peut sans doute parler des heures sur n’importe quel sujet : imaginez la joie intellectuelle de voir ces quatre écrivains se démener avec un sujet aussi intéressant.
Si j’ai dit que cette table ronde était bondée, ce n’était rien comparé à un autre événement, la table ronde sur « Les femmes de Star Trek » (avec, évidemment, quatre femmes ayant joué des rôles dans Star Trek). Voici ce que j’ai vu à mon arrivée un peu tardive :
Nul besoin de dire que je n’ai pas tenté d’aller plus loin. Les photos de Marina Sirtis devront donc attendre une autre convention… Mais si c’est la célébrité qui vous amenait à L.A.Con IV, il y avait des alternatives bien accessibles.
Un autre effet du « décalage horaire » de L.A.Con IV comparé aux autres Worldcons a été de bouger la mascarade du dimanche au vendredi. En soirée, des centaines de fans se sont donc dirigés à l’amphithéâtre du centre des conventions pour assister à l’événement. Je fus l’un d’eux, brièvement : cinq minutes après être entré dans l’amphithéâtre, je me suis rappelé pourquoi les mascarades me laissent tout à fait indifférents et j’ai préféré quitter pour aller donner un coup de main à l’équipe d’Anticipation 2009 pour leur party événement promotionnel. Les deux heures de la mascarade n’ont pas été de trop pour tout préparer, parce que les fans ont commencé à déferler dès l’ouverture des portes à 10h00. Il faut dire que ce n’est pas le choix d’alcool de divertissement qui manquait au Hilton :
C’est durant la soirée qu’une des grande nouvelles de la convention s’est graduellement communiquée de bouche à oreille : Dans une des victoires les plus serrés de l’histoire des Worldcon (12 votes sur un total de plus de 1,300), c’est Denver qui a triomphé sur le grand favori Chicago pour l’honneur d’accueillir Denvention 3 : Worldcon 2008. Plusieurs fans de Chicago étaient, assez raisonnablement, surpris et déçus de ce résultat.
La soirée fut longue. Le matin fut hâtif. Mais cela est une autre journée.