Congres 2007: VCON 32: Notes tardives
Voyager de l’autre côté du continent pour assister à un congrès de SF n’est pas une expérience à tout casser. (Ça n’impressionne même pas les collègues au bureau.) Mais on peut probablement s’entendre pour dire qu’il s’agit d’une activité qui prend du temps. Le congrès lui-même ne dure que trois jours, mais enrobez ça de tourisme, du voyage d’avion nécessaire pour s’y rendre et en revenir, des préparatifs au départ et du rattrapage à l’arrivée et vous terminez rapidement avec deux semaines d’irruptions.
Ce qui, dirons certains, est une façon de faire durer le plaisir. Mais bon: Avec les tracas reliés à l’aviation moderne, même ce vieux Jules César se serait contenté de dire j’ai été, j’ai vu, je suis revenu. Maintenant que ma vie réintègre sa routine (et juste à temps pour la World Fantasy Convention, en plus!), qu’en est-il de mon passage à VCON 32? Vous avez sans doute vu la bonne nouvelle, et la plupart de nos lecteurs comprendrons que n’importe quelle congrès d’où l’on revient avec un Prix Aurora ne peux être un congrès complètement mauvais. Pour le reste, voici quelques notes de voyage…
Nature du congrès: VCON est un congrès régional de SF généraliste. Les spécialistes vous diront qu’il n’existe plus que cinq de ces conventions old school au Canada: Con*Cept (Montréal), Ad Astra (Toronto), Keycon (Winnipeg), Conversion (Calgary) et VCON (Vancouver). Le reste est plus spécialisé (Boréal y compris), plus intéressé aux médias (Polaris) ou dédié à une manifestation particulière du genre (Otakuthon). Mais, tel que relevé dans mes rapports au sujet de Con*Cept, il n’est pas facile d’être un congrès généraliste en une ère d’hyper-spécialisation de sphères d’intérêt: La masse critique pour faire briller de tels événement est difficile à atteindre, et le résultat est souvent une collection de mini-congrès prenant place en parallèle pendant quelques heures. Les joueurs ont leur salle; les costumiers ont leur mascarade; les filkers ont leur concert et leurs sing-alongs; les geeks ont leurs panels techno-scientifiques; les amateurs de SF&F média ou écrite ont leur discussions au sujet de ce qui les intéresse. Évidemment, ça donne des groupes d’une trentaine de personnes au maximum, mais l’essentiel est de pouvoir retrouver ses copains, n’est-ce pas? À cet égard, je n’ai pas été déçu.
Canvention: VCON 32 était également l’hôte de la Canvention 2007, la “réunion de famille” plus ou moins officielle de ceux qui s’intéressent à la SF canadienne. Ceci étant l’ouest du pays, il y avait donc une concentration de fans, auteurs et organisateurs de la Colombie Britannique et de l’Alberta. Pour moi, ce fut une excellente occasion de renouer avec plusieurs personnes que j’avais rencontré il y a deux ans à Westercon (Calgary) et de constater que j’avais clairement laissé une impression, puisqu’ils se souvenaient toujours de moi. Quelques visages familiers de la région de Toronto s’y trouvaient également, en plus de Jean-Louis Trudel (qui a bien décrit l’événement en deux billets.) C’est ainsi que VCON s’est avéré plus intéressant entre les fissures de la programmation officielle: Les repas passés en groupe, les rencontres dans les corridors, les plans et projets et retrouvailles et constatations sur l’état de l’industrie. Les critiques des Prix Aurora seront content d’apprendre que des décisions assez importantes sur le déroulement du prix ont été prises, et que les changements, plus évolutifs que révolutionnaires, devraient être perceptibles dès l’an prochain. (Je n’en dis pas plus pour l’instant, laissant à la nouvelle équipe d’organisateurs le soin d’annoncer ce qu’il y a de neuf.)
Programmation: VCON n’a pas été particulièrement réussi au niveau de la programmation, une déficience que même les organisateurs étaient prompts à reconnaitre. Lors des commentaires de fin de congrès, j’ai cru comprendre que la chargée de programmation a eu des problèmes personnels qui l’ont empêché de livrer la marchandise. De la perspective d’un panéliste, je peux vous dire que mes courriels pré-congrès sont tombés dans un trou noir (Jean-Louis Trudel s’est avéré plus persistant), que mon nom était sur certaines versions de l’horaire et pas d’autres, que j’ai dû consulter le babillard au congrès pour savoir à quels événements je devais participer, et que seules les feuilles collées en avant des salles possédaient la description des table rondes en question. Mais je ne serai plus empathique que critique: on a appris tard durant le congrès que ladite chargée de programmation a souffert d’un empoisonnement alimentaire en mangeant au food court du petit centre commercial attenant à l’hôtel, ce qui (parlant comme directeur occasionnel de programmation) est pousser la rétribution karmique un peu trop loin! Comme d’habitude, ce fut aux habitués de tels congrès de s’organiser entre eux pour fournir les conversations, ce qui fut fait. Il y a de ces gens qu’il suffit de mettre en avant d’une audience pour obtenir une bonne discussion, et VCON en comptait quelques-un(e)s.
Présence francophone à VCON: Jean-Louis Trudel et moi étions les deux représentants de la francophonie à la Canvention (Le légendaire Claude-Michel Prévost était aussi à l’horaire, mais nous ne l’avons pas aperçu.) et on nous a fait une belle place. Il était optimiste de vouloir tenir des panels en français, mais raisonnable de proposer des discussions au sujet de la SF en français. Malgré un horaire approximatif et le mauvais calcul des organisateurs d’annoncer les tables rondes comme étant en français, on a tout de même attiré des groupes de 7-8 personnes aux événements “SFQ 101” et “Traduction”, ce qui se comparait avantageusement aux 4-5 personnes qui se trouvaient dans la salle aux tables rondes francophones de Con*Cept! (Les questions de l’auditoire portaient plus sur les différences culturelles entre SF franco et anglo, ce qui m’a bien embêté étant donné la nature anecdotique du corpus de la SFQ jusqu’ici. Mais quand Jean-Louis a donné comme exemple Chronoreg, j’ai bien dû constater que certains romans francophones restent impubliables en anglais…) Bref, on nous a fait un accueil sympathique. De plus, la cérémonie des Auroras s’est somme toute assez bien soldée pour les nominés francophones qui sont repartis avec 5 des 10 trophées (en plus d’une mention francophile pour Cathy Palmer-Lister de Con*Cept).
Hôtel: Plusieurs aspects du Radisson President où était situé le congrès fonctionnaient bien. La plupart des événements, par exemple, prenaient place sur un seul plancher, et l’aire commune était à la fois vaste et dominée par une décoration intéressante. En revanche, les salles disponibles ne convenaient pas aux besoins de VCON: Les trois salles principales étant réservées pour la salle de jeu, la salle des marchands (un peu surchargée et difficile à naviguer) et les événements principaux tels les Prix Auroras. Tout le reste s’est retrouvé dans des salles assez petites. Je ne suis jamais entré dans l’exposition artistique, par exemple, parce qu’elle paraissait surchargée même de l’extérieur. Idem pour plusieurs événements tenus dans des salles plus modestes. Quelques efforts de dernière minute ont été nécessaires pour faire entrer le Turkey Reading et l’encan CUFF. Mais bon: Si vous voulez un aperçu d’une terreur existentielle profonde, abordez le sujet des hôtels convenables auprès d’un directeur de congrès et préparez-vous à entendre des histoires…. (La chose n’est pas plus facile pour les hôtels: On a appris au débreffage final que VCON fut tellement spécial qu’une personne de l’hôtel a préféré donner sa démission que de continuer à traiter avec le congrès.) Bref, personne n’a été surpris d’apprendre que VCON se cherche un autre hôtel pour l’an prochain.
Autour de l’hôtel: Si la représentation non caucasienne à l’intérieure de VCON était plus ou moins ce qu’elle est habituellement à ces congrès (c’est-à-dire: minuscule), il n’y avait qu’à sortir du Radisson pour devenir une minorité visible. Le congrès se tenant à Richmond, en banlieue sud de Vancouver, les environs étaient dominés par les affiches en langue chinoise avec un peu d’anglais pour les touristes. L’hôtel lui-même était relié par une passerelle à un tout petit centre commercial asiatique (où Jean-Louis Trudel et moi nous sommes retrouvé les seuls caucasiens dans un restaurant dim sum familial), et il n’y avait qu’à traverser la rue pour se trouver au Aberdeen Centre, un centre commercial de trois étages superficiellement comme n’importe quel mail commercial… si ce n’est des magasins peu familiers, du concessionnaire Ferrari/Maserati au premier étage, des cinq magasins de thé, des quatre magasins d’accessoires pour auto, de la librairie en langue chinoise (j’en suis ressorti avec une traduction de “Fahrenheit 451”), du manque de corridors en angles droits, des pieuvres au menu du food court et du magasin dédié aux toilettes. Bref, une expérience à ne pas rater. Je recommande particulièrement la librairie en langue étrangère, si seulement pour avoir l’impression d’être analphabète au milieu de milliers de livres.
Vancouver: Je vous ferai autrement grâce de l’essentiel de mes notes de voyage sur la ville de Vancouver, si ce n’est pour dire qu’il est facile de voir pourquoi il s’agit d’une destination particulièrement prisée: La combinaison d’un centre-ville très moderne serti dans un écrin de montagnes, de forêts et d’eau profonde est spectaculaire. (Ceci dit, je noterai que j’ai vu le soleil exactement quatre fois pendant les six jours que j’ai passé là-bas, et que trois de ces apparitions se chronométraient en minutes.) Le grand rêve canadien: Accumulez vos deniers et vous pourrez prendre votre retraite à Vancouver, loin des bordées de neige…
Mais en attendant, rendez-vous à la prochaine Canvention, qui s’arrêtera à Winnipeg en mai 2008 pour Keycon 25.